L’érable à sucre
À l'invitation de Sébastien Hebray j'ai écrit ce court texte pour le Journal La Marseillaise. Je reproduis ici le texte publié. Notez que le bref article est quelque peu "contextualisé" pour un public de Marseilles... Cela m'autorise néanmoins d'exprimer toute mon affection pour cet arbre et ses services...
Vous les faites quand vos vendanges? Nous, au Québec, c’est au printemps! On dit « faire les sucres », nous recueillons alors l’eau d’érable: le nectar d’avril. Les Japonais ont aussi une fête du renouveau, l’hanami, à la floraison des cerisiers. Ici, ce ne sont pas les fleurs peu remarquables des érables qui nous tonifient. Ce que nous célébrons c’est la montée de sa sève, signe attendu de la fin de l’hiver.
L’érable à sucre est montagnard et produit notre Sainte-Croix-du-Mont. Enfin, avec un peu d’aide des humains… À 2 ou 3 % de sucre il a fallu les sens aiguisés des amérindiens pour apprécier les qualités de cette eau. Ils savaient concentrer le sucre avec des pierres chauffées jetées dans des bassins d’écorces de bouleaux. Ce seront toutefois les chaudrons de fer des colons qui permettront la fabrication de la tire, du sirop doré, du beurre puis du sucre granulé. Toutes ces déclinaisons concentrant encore plus le sucre (jusqu’à 90%) avec des arômes de caramel vanillé, de noisette et de fumée.
Cet arbre domine nos saisons et nos paysages. Que serait octobre dans les Laurentides ou les Appalaches sans lui? Que serait le Canada… son drapeau?
À l’automne, les touristes japonais viennent à pleins autocars pour un peu de momijigari, à l’affût des feuilles rouges. Pour nous, cette coloration de la frondaison de l’érable à sucre est surtout signe de son engagement explicite pour l’année suivante. Il nous dit: le printemps viendra et vous aurez ma sève.
Dans la morte saison il élabore discrètement le jus réjuvénateur, le paysage quintessencié. Au printemps, tous ces arpents de neige livreront, enfin, le sucre du pays, une humeur rêveuse tirée du long sommeil de la Grande Blancheur.
Aimons-nous cet arbre? Oui! Dommage qu’il soit si peu adaptable au milieu urbain. Dans les quelques forêts de l’île de Montréal sa présence dominante ne laisse aucun doute. On le trouve parfois dans nos grands parcs. Mais sur nos rues et trottoirs? Non… Il veut grand air, roches et collines.
D’automne et de printemps, l’érable est inestimable. Nous avons rendez-vous!
NB: Les illustrations sont tirées (et retravaillées un peu) de mon livre numérique Stabat Arbor. Je vous recommande ce livre si vous voulez tout savoir sur les érables, les ormes et les cerisiers à grappe...
En attendant, attendons le printemps...
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