"Faire avec" au Champ des Possibles


 Début juin, le temps le plus bleu et vert au Champ des Possibles. Le matin: c'est imbattable!


Vous ne ferez pas mieux que ce qui est commencé ici. Des haies: ce sont des produits spontanés de la grille orthogonale de la ville. Les semences de toutes sortes, apportées ici par le vent, les oiseaux et autres animaux, dont les humains... se mettent à pousser... 

Difficile de faire mieux. Mais au lieu d'être en direction paysagère, on peut être assistant? Peut-être pouvons-nous seulement inverser la proportion des espèces exotiques et indigènes? Puisqu'il s'agit de favoriser la biodiversité de notre région? Pas celle d'une autre...

Ce serait déjà un bon commencement!


Ce tunnel! Qui donc a fait ça? Essayez de faire mieux! "Ludique" sans le dire. Faire avec les formes paysagères produites par les lieux, les usages et le temps. Par des processus écologiques aveugles... qui sont donc, forcément parfaitement adaptés, écologiquement enrichis et fonctionnels. 


Un mur de centaines de jeunes ormes de Sibérie: laisser aller un espace réputé naturel, est une erreur. C'est un effondrement de la biodiversité par une monoculture. Un habitat de la biodiversité en milieu urbain demande une gestion. Les environs sont une dynamique chaotique! Et cette gestion sera d'autant meilleure (et économiquement envisageable...) que si elle est assurée par un groupe de citoyens. On peut voir quelques problèmes avec ça, non?

Tant de regards intéressés (faites vous-mêmes cette liste dans votre tête) sont braqués sur ce qui s'était d'abord élaboré par des citoyens.


Voyez cette perspective (préservée de justesse...) sur le lot Bernard. La haie à gauche a reçu beaucoup de nouvelles espèces en 2015. Érables rouges, à épi et de Pennsylvanie, viornes, aubépine et sorbiers (pas l'indigène, malheureusement...), rosiers odorants, etc.  

Afin de préserver des vues sur la voie ferrée (qui est le génie des lieux avec les lignes de désir), la haie est discontinue sur la droite. 


La haie sur la rue Bernard (celle à gauche sur la photo précédente). Les amateurs d'oiseaux apprécient parce que les oiseaux apprécient... Une bonne gestion écologique demandait des fauches tardives annuelles de la strate herbacée.


Au bout du lot Bernard, allons voir ce qui s'appelait la Cabane 77. Incendiée il y a quelques années, sa structure d'acier est encore là, tout juste derrière les grands peupliers deltoïdes.


Il y ici a toutes sortes d'oeuvres d'art, de tous les matériaux. C'est aussi un cimetière: étonnant de trouver ici un des glands de la fameuse oeuvre d'art (Le Proliférateur) à partir d'un carolin abattu au parc La Fontaine. 


Puis j'ai rencontré Jeff Harrison, ornithologue bien connu. En 2010, quand j'ai commencé à parler de l'importance éco-paysagère des haies (avec un bâillement général comme réception...) j'avais cherché des références (ça prend toujours des références, n'est-ce pas?) et j'étais tombé sur ce superbe projet à Ottawa: le Fletcher Wildlife Garden

J'ignorais qu'ils avaient déjà fait ce que je proposais de faire: des haies denses et variées. Des haies écotonales, avec des espèces indigènes évidemment! Voyez cette page: The Hedgerow. Jeff Harrison était justement de ce groupe: le Ottawa Field-Naturalists’ Club. 

Cette rencontre fortuite était parfaite. La conversation avec Jeff allait de soi. Il ne connaissait pas les projets, les plans, les travaux et les plantations faits ici et je n'étais pas malheureux de trouver une oreille attentive, familière des approches écologiques originales en milieu urbanisé (anthropique). Par des citoyens naturalistes. Le gage de succès, nous en convenions.

Voyez la liste des oiseaux du CDP, à laquelle il a largement contribué. Je constate qu'un autre observateur a vu le faucon émerillon! Il vient dans les environs depuis de nombreuses années.



Le Champ des Possibles, maintenant, vous savez, la Ville sera s'en chargera. La dure réalité viendra souffler les rêves et la créativité. La décontamination des terrains s'en vient et je n'ai pas vu les plans de ces interventions peut-être nécessaires.

Ce qui me fait craindre le plus c'est les architectes du paysage. J'ai vu assez de leurs interventions pour avoir une base de jugement. Ils savent assurément générer sur demande pour les dimensions et les lieux que vous voulez les mêmes platitudes en rang d'oignons. Ce sont des techniciens. Des fois ils font dans les lignes sinueuses: quand il faut faire "créatif" et que les budgets le permettent. 

Je crains, donc. Vous connaissez le slogan: 

Montréal «Ville Unesco de design». C'est pas Montréal, ville de biodiversité. On aurait pu le croire un instant...



L'épilobe à feuilles étroites (Chamaenerion angustifolium). Une des espèces de la strate herbacée au pied des haies, introduites en 2015. Vous croyez que ça intéressera les abeilles indigènes? Planter pour les insectes et les oiseaux et l'éducation des citadins urbains: c'était le projet!

On aura des tulipes...

"Build it and they will come" me disait Jeff. J'en disais autant au Champ des Possibles. Le concept "haie écotonale" a duré jusqu'à maintenant. Je l'ai bien défendu. Mais...

"Faire avec", c'était dans le temps...

Ce sera peut-être pour l'avenir, ailleurs: allez voir mon livre La Haie dans le Bocage Urbain.

Bon weekend camarades!

Commentaires

  1. Je suis bien contente de cette visite commentée, c'est agréable, moi qui vit ailleurs dans la banlieue et connais LCP que par votre écriture. J'espère bien pouvoir bien m'orienter et le visiter quand je viendrai à Montréal voir mes petits-descendants universitaires. Je veux voir le champ des possibles avant qu'il n'existe plus. Je prendrai des photos.

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